Le 26 avril 2011, les Présidents d’Ukraine et de Russie, Viktor Yanoukovitch et Dmitri Medvedev respectivement, ont dévoilé à Tchernobyl la première pierre de ce qui deviendra un mémorial le 14 décembre prochain. Cette cérémonie en grande pompe illustre que le souvenir de la catastrophe vingt-cinq ans après demeure vivace dans les mémoires même si les jeunes générations en sont désormais moins préoccupées. Dans le même temps, cette rencontre au sommet sur ce sujet ô combien sensible du nucléaire civil et des risques inhérents à son exploitation ramène indéfectiblement vers le Japon et la lutte qui s’y déroule dans le nord du pays contre l’ennemi invisible.
Il est désormais acquis que la catastrophe de Fukushima provoquée par le séisme à proximité de Sendai le 11 mars 2011 est dorénavant d’une gravité exceptionnelle.
Il demeure bien entendu difficile de connaître la portée réelle des dommages subis par la centrale, et surtout les atteintes à l’environnement immédiat (air, terre, mer) mais il apparait déjà que les dommages sont irrémédiables pour une longue période à venir. Dans le Figaro du 08/04/2011, ce passage qui en dit long :
…la zone la plus contaminée est celle qui se trouve autour de la centrale. La radioactivité y est supérieure à 12,5 millirems par heure (12,5 mR/h), le rem étant l’unité de dose radioactive utilisée aux États-Unis. Cela équivaut à 125 microsieverts par heure (125 µSv/h). «Les personnes stationnant dix heures dans cette zone reçoivent la dose limite à laquelle le public peut être exposé en une année en France», poursuit Bruno Cessac de l’IRSN.
Cette catastrophe nucléaire ne serait pas, lit-on ici et là, anodine à la défaite électorale d’Angela Merkel dans le Baden-Württemberg en plaçant historiquement les écologistes à la tête du Land. Et les derniers sondages en Allemagne indiquent une croissance exponentielle des intentions de vote pour les Grünen. Cette inquiétude n’est toutefois pas localisée qu’outre-Rhin mais s’est répandue sur la planète et en priorité au sein des pays disposant de nucléaire civil, alimentant mémoires et enquêtes pour rassurer non seulement l’opinion mais aussi pour connaître les risques potentiels d’une semblable catastrophe sur le territoire national. Si l’on désigne le nucléaire comme une énergie dangereuse et vengeresse, l’on pointe cependant moins les errements et les manquements ayant conduit à ce drame : comment il est vrai admettre que les normes de sécurité furent négligées par simple souci de réduction des coûts d’investissement? Aggravé il est vrai par la latence des autorités à prendre conscience de la situation et des responsables de la société TEPCO (Tokyo Electric Power) à réagir pour ne pas laisser davantage l’état des réacteurs empirer dans les premiers temps.
Ce faisant est poignante toute une réalité sociale et économique particulièrement dramatique en révélant combien les sous-traitants, (viande à rems), paient un lourd tribut lors de cette lutte contre l’aggravation des dégats, et surtout nécessite de prendre conscience de la portée du sacrifice des ingénieurs, liquidateurs, de Fukushima, les samouraï ou même kamikazes du nucléaire comme on peut le lire parfois.
Au sein d’une dépêche de l’AFP en date du 17 mars, l’on pouvait lire ceci :
… »Les gens qui travaillent sur ces centrales se battent sans reculer », commente Michiko Otsuki, une employée de la centrale de Fukushima 2, située à 12 km des réacteurs endommagés.
« Je ne peux que prier pour la sécurité de tous… N’oubliez pas qu’ils travaillent pour protéger chacun d’entre nous en échange de leurs propres vies », a écrit Mme Otsuki dans un message sur le site de socialisation japonais Mixi.
Le Premier ministre Naoto Kan a également salué le courage de ces travailleurs qui « s’efforcent d’arroser, de faire tous les efforts possibles sans même penser au danger »…
Cela fait indubitablement revenir à 1986 et Tchernobyl où l’URSS livra sa dernière grande bataille sur son sol, et obtint la victoire au prix de la vie ou l’infirmité de nombreux volontaires… Les liquidateurs de Tchernobyl furent de ces héros des temps modernes, sauvant leurs foyers, leur pays et l’Europe. Sans eux qui sait ce qu’il aurait pu advenir? Pourtant ces derniers meurent à petit feu, et d’encore trop rares statues viennent rappeler leur dévouement et sacrifice. Reste que l’Histoire se devra de leur rendre justice fût-ce à défaut des gouvernants.
Une nouvelle bataille a débuté depuis mars, en plein coeur de la centrale de Fukushima et de ses six réacteurs…
Cet article est repris du site https://alliancegeostrategique.org/2...