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Le syndrôme « Anzio Annie » (...) 11. Intelligence stratégique
23 September 2010
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11. Intelligence stratégique : Le syndrôme « Anzio Annie » : le rôle de l’artillerie dans la bataille d’Anzio-Nettuno
source : Alliance Geostrategique
Publié le 6 March 2010, dans la rubrique Intelligence stratégique..  Send this article by mail Send

Le matin du 22 janvier 1944 débute l’opération Shingle (galet) : la 5ème armée anglo-américaine débarque sur les plages d’Anzio et Nettuno. La résistance est si faible que tous les objectifs sont atteints dès midi ; au jour-J, les troupes alliées se sont enfoncées à 6 km à l’intérieur des terres. Le débarquement a lieu à 50 km au sud de Rome et à 90 km au nord-ouest de la principale ligne de défense allemande en Italie, la ligne Gustav, arc-boutée sur le Monte Cassino, où les Alliés butent alors en vain. Il prend complètement par surprise les Allemands.


Dans la semaine qui suit, alors que les Alliés se contentent de consolider la tête de pont, les Allemands vont être capable de rassembler suffisamment de troupes pour bloquer toute exploitation du débarquement. Les quatre mois qui suivent dans la tête de pont d’Anzio vont compter parmi les plus durs combats de la campagne d’Italie entre 1943 et 1945. Les combats se transforment en une guerre de positions extrêmement coûteuse caractérisée par un intense échange de feu indirect. Le but du présent article est d’insister plus particulièrement sur le rôle de l’artillerie dans les combats dans et autour de la tête de pont d’Anzio/Nettuno.


Genèse de l’opération Shingle


L’idée d’un débarquement à Anzio a germé dans les esprits du haut-commandement allié dès le mois d’octobre 1943, après le débarquement de Salerne et la farouche résistance opposée par les troupes allemandes du maréchal Kesselring. L’exemple du débarquement britannique à Termoli, les 2-3 octobre, qui s’achève brillamment, décide les planificateurs alliés à bâtir un plan de débarquement au sud de Rome, à Anzio, dans le cadre, initialement, d’une offensive à trois pinces en direction de la capitale italienne. En raison des préparatifs du débarquement en France, le plan tombe à l’eau dès novembre. Mais Eisenhower, qui prend le commandement du corps expéditionnaire allié amené à débarquer en Normandie, laisse la place au général Wilson en janvier 1944, un ardent partisan de la stratégie périphérique de Churchill en Méditerranée. Le débarquement est donc remis à l’ordre du jour et il est prévu pour la fin janvier. Anzio est choisie pour sa proximité avec Rome, mais aussi parce qu’elle se situe dans le rayon d’action des chasseurs alliés basés à Naples. Anzio, à proximité des Marais Pontins, a été l’objet de la politique de mise en valeur des terres et de constructions agricoles modernes par le régime de Mussolini avant la guerre : on y trouve le canal Mussolini, de nombreuses digues et autres installations de drainage. Une semaine avant le débarquement, les forces alliées doivent lancer une attaque sur la ligne Gustav pour percer le front allemand et, en parallèle avec le débarquement à Anzio, foncer sur Rome. Le général américain Clark, qui commande la 5ème armée, détache le VIème corps du général Lucas pour mener à bien l’opération Shingle. Or, les officiers américains ne croient guère aux chances de succès de l’opération, estimant les effectifs engagés trop faibles et s’attendant surtout à une farouche résistance au moment du débarquement, comme à Salerne en septembre 1943. Ceci aura de graves conséquences pour la suites des opérations.


L’assaut est menée par la 3ème division d’infanterie américaine et la 1ère division d’infanterie britannique, soutenues par un régiment de chars britanniques, un bataillon de chars américains, le 504ème régiment de la 82ème division aéroportée américaine, le 509ème bataillon de parachutistes, deux bataillons de commandos britanniques et trois bataillons de Rangers américains. En réserve, prêts à être débarqués dès que la tête de pont sera établie, se trouvent la 45ème division américaine et le Combat Command A de la 1ère division blindée américaine. Le débarquement s’effectuera sous la protection d’un « parapluie » de 2600 avions alliés. 376 navires de tout type participent au débarquement.


« Une baleine échouée » : le calvaire de la tête de pont d’Anzio


Le débarquement commence le 22 janvier à 2h du matin. La surprise est totale : les Allemands ont en effet dépêché toutes les réserves ou presque stationnées dans la région pour contrer l’offensive sur la ligne Gustav qui a commencé le 12 janvier, et qui d’ailleurs n’aboutit pas. Au soir du premier jour, 36 000 hommes et 3200 véhicules, soit 90 % de la force d’attaque, ont débarqué, au prix de 3 morts, 97 blessés et 44 disparus ; 227 Allemands ont été faits prisonniers. Les troupes alliées avancent quelque peu pendant les trois jours suivants, mais sans pouvoir s’extraire véritablement de la tête de pont ; Lucas décide de stopper la poussée pour consolider celle-ci, soumise aux attaques aériennes violentes de Luftwaffe, qui perd 97 appareils jusqu’au 1er février mais réussit à couler un destroyer américain et un navire hôpital, et à détruire de nombreux stocks de munitions dispersés sur les plages. Lucas fait finalement débarquer la 45ème division américaine et le reste de la 1ère division blindée, disposant alors de plus de 60 000 hommes.


Pris par surprise, les Allemands se ressaisissent rapidement. Kesselring, avec l’accord d’Hitler, dépêche des éléments de la division Herman Göring, de la 4ème division de parachutistes stationnées au sud de Rome pour défendre les monts Albains qui surplombent la tête de pont alliée. La 3ème division de Panzergrenadiers et la 71ème division d’infanterie font aussi mouvement vers Anzio, ainsi que d’autres unités rappelées de France, d’Allemagne, de Yougoslavie et d’ailleurs en Italie. Le 24 janvier, le général Mackensen, qui commande la 14ème armée allemande, dispose déjà de 40 000 hommes, des éléments venant de 8 divisions en tout, sans compter les 5 autres qui sont en route. Le 28, ce sont 70 000 Allemands qui font face à la tête de pont, avec une offensive prévue pour le 1er février.


Les Américains lancent eux-mêmes une attaque en deux pinces à partir du terrain conquis les premiers jours, le 30 janvier. Une des deux pinces, constituée en particulier des bataillons de Rangers, se rue dans le secteur de Cisterna sur le dispositif allemand, qui se prépare lui-même à attaquer. Le 4ème bataillon de Rangers est anéanti, avec seulement 6 survivants sur 767 hommes ; plusieurs centaines de prisonniers sont d’ailleurs promenés dans les rues de Rome pour impressionner les Italiens. Les Allemands passent à la contre-attaque et font échouer l’entreprise alliée. Jusqu’à début mars, les combats se résument à des attaques et contre-attaques violentes de chaque côté, sous les feux terribles de l’artillerie et de l’aviation. Deux tiers des pertes subies par le VIème corps allié (29 200 au combat et 37 000 hors combat) le sont entre le jour-J et la période d’affrontement s’étalant jusqu’au 4 mars. Suit une pause dans les combats de trois mois, jusqu’à la percée alliée fin mai.


« Anzio Annie » : la puissance de feu allemande à Anzio


A la fin de la première semaine de février, les soldats américains sont confrontés à des tirs d’un calibre encore inconnu. Les obus qui tombent à l’eau soulèvent des geysers de près de 70 m de haut ; des bâtiments en dur de trois étages sont pulvérisés ; un cimetière est complètement retourné, projetant les restes des morts partout aux alentours. Les spécialistes de l’artillerie examinent les fragments d’obus et dressent le profil de l’engin de mort : un canon de 280 mm, sans doute sur rail, et qui tire à près de 60 km de distance.


En effet, pour appuyer leur offensive et contrer l’effet du feu naval allié qui les a littéralement écrasés à Salerne, les Allemands ont fait venir du nord dès le 2 février deux pièces sur voie ferrée de 280 mm, vite baptisées « Anzio Annie » ou « Anzio Express » par les Alliés. Les pièces sont utilisées le 7 février contre les navires déchargeant à Anzio et Nettuno. Les canons de 280 mm sur rail sont en fait des K5 Krupp, d’un tube de 21,5 m de long, dont la conception remonte aux années 30. Huit ont été construits jusqu’en 1940 et trois sont d’ailleurs déployés sur la côte française pour bombarder l’Angleterre après la défaite de mai-juin 1940. Robert et Leopold, les deux pièces qui bombardent la tête de pont d’Anzio, sont abandonnées et sabordées par leurs équipages après la percée du mois de mai ; elles sont découvertes le 7 juin 1944 par des éléments de la 34ème division d’infanterie américaine. Robert, trop endommagé, ne peut être récupéré, ce qui n’est pas le cas de Leopold, ramené aux Etats-Unis sur le polygone de tir d’Abderdeen, dans le Maryland, où l’on peut toujours le voir aujourd’hui.


Les pièces utilisés à Anzio sont dissimulées dans des tunnels, et ne font feu que de nuit ou les jours couverts pour éviter les attaques aériennes. Les Allemands avaient prévu l’envoi d’un canon encore plus gros de 320 mm Skoda, de construction tchécoslovaque, mais ils ne disposaient pas d’un tunnel adapté pour le dissimuler. En revanche, une autre batterie de canons de 210 mm sur rail est employée à partir de tunnels à l’ouest d’Albano, à proximité de Castel Gandolfo, résidence d’été des papes.


Du côté allemand, dès le 5 février, on aligne déjà 372 pièces d’artillerie dont 152 dépassant le calibre de 150 mm. Le 16 février, 452 pièces allemandes font face aux 432 pièces alliées. Le 22 février, les Alliés alignent seulement 60 canons Long Tom de 155 mm plus 12 obusiers de 240 à la portée moindre, mais au projectile trois fois plus puissant. Les Allemands disposent quant à eux de 4 canons de 100 mm, 8 autres du même calibre de fabrication italienne, 18 canons de 170 mm, 3 canons français de 220 mm, 2 canons français de 240 mm, 2 canons sur rail de 280 mm, 20 obusiers de 150 mm, 8 obusiers auto-propulsés, 36 mortiers de 150 mm et 21 mortiers de 210 mm, sans compter les pièces légères. La concentration d’artillerie est donc impressionnante pour battre un espace aussi étroit que la tête de pont d’Anzio-Nettuno.


Chaque fois qu’un obus frappe la tête de pont alliée, les soldats l’attribuent à « Anzio Annie », mais en réalité le dispositif allemand en matière d’artillerie est beaucoup plus large : de nombreux canons ou obusiers de 220, 210 et 170 mm sont présents. Ceux de 170, situés sur les collines environnantes, ont une portée de 10 km, et leurs munitions font plus dégâts que les pièces sur rail de 280. Le 16 février, jour d’une grande contre-offensive allemande, sont tirés 454 coups de 170 mm contre seulement 50 de 210 mm sur rail. Le 29 février, 18 pièces de 170 mm tirent 600 coups contre 12 seulement aux pièces de 210 mm. Les pièces sur voie ferrée sont capricieuses ; mais les chiffres montrent aussi que les pièces allemandes surclassent de loin leurs homologues alliés, le plus gros tube américain étant le canon de 155 mm Long Tom avec une portée de 23 km.


La supériorité allemande en artillerie à Anzio constitue un véritable choc pour l’armée américaine, déjà mise à mal dans la tête de pont d’Anzio devant les hésitations et le manque d’originalité de Lucas, qui prive les Alliés de l’initiative indispensable à la réussite de l’opération. Les forces américaines vont donc devoir changer leurs tactiques pour réussir à sortir de l’impasse.


L’artillerie au secours de Lucas !


Les premiers changements de doctrine concernant l’emploi des matériels interviennent au sein de la 1ère division blindée américaine, débarquée dans la tête de pont. La topographie du terrain, avec de nombreux villages et finalement peu d’espace pour le mouvement d’unités blindées, ne convient pas à l’emploi des chars. Les commandants de chars commencent alors à utiliser leurs engins comme pièces d’artillerie, se rattachant aux bataillons correspondants ou agissant comme pièces indépendantes. L’artillerie elle-même entame une modification de ses missions : au lieu de préparer les objectifs attaqués ou de cibler des objectifs d’opportunité, elle pratique des tactiques de harassement ou de destruction. Par exemple, le 698ème bataillon d’artillerie de campagne américain, équipé de 4 obusiers de 240 mm et de 4 canons de 203 mm, effectue 69% de tirs de harassement entre les 11 mai et 4 juin 1944 sur l’ensemble des tirs réalisés. Cela implique d’ailleurs une pression plus grande sur la logistique (dépenses de munitions lourdes élevées) et moins de missions consacrées à des tâches offensives.


Les Allemands font de leur côté un bon usage des villes de Carroceto et Aprilia. Des observateurs avancés ont une vue directe sur l’ensemble de la tête de pont et peuvent diriger à loisir le tir de leurs batteries. Les Alliés doivent recourir à d’abondants barrages fumigènes pour se déplacer dans une discrétion toute relative, sur un terrain plat et souvent dépourvu de protection. Les postes d’observation allemands se révèleront particulièrement efficaces pour guider les tirs préparant les contre-attaques allemandes ; les troupes alliées souffrent de l’artillerie adverse car Lucas n’a pas poussé assez loin pour s’emparer des hauteurs investies par les Allemands.


Après le remplacement de Lucas par Truscott, l’ancien chef de la 3ème division américaine débarquée dans la tête de pont, une conférence est réunie par ce dernier pour déterminer comment améliorer le tir de contre-batterie. Le recours à des observateurs côté allié se fait plus fréquent, la coordination avec l’aviation pour détruire les pièces allemandes est améliorée. La plupart des missions de préparation d’attaque sont effectuées avec des observateurs avancés : 52 % des frappes le sont le 31 janvier lors de l’attaque de la 3ème division sur Cisterna. Le pourcentage reste à 53 % en mai, ce qui est néanmoins bien plus que d’autres corps américains engagés sur d’autres théâtres d’opérations. Des reconnaissances détaillées des positions ennemies sont exécutées pour cibler plus précisément les objectifs ennemis. Les bulletins météo sont plus fréquemment consultés pour être certain des emplacements des batteries et des variations dans l’atmosphère. Les Américains emploient davantage les obus percutants à retard, des HE suivis de munitions au phosphore blanc. La concentration de plus de pièces pour les préparations aboutit aussi à de meilleurs résultats. Le 31 janvier par exemple, l’attaque du 15ème régiment d’infanterie américain était soutenu par le tir de trois bataillons d’artillerie de campagne. Lors de la contre-attaque massive des Allemands le 16 février, les Alliés tirent 65 000 obus le premier jour, et 45 000 puis 25 000 les deux jours suivants. Le 19 février, 8 régiments d’artillerie britanniques, 8 bataillons d’artillerie de campagne, les grosses pièces des navires de guerre, des canons anti-aériens de 90 mm utilisés en tir direct, 132 chasseurs-bombardiers et 92 bombardiers moyens appuient l’assaut d’un régiment d’infanterie et d’un régiment de char alliés. Le feu stoppe littéralement sur place la contre-attaque allemande : 5 389 soldats sont tués, blessés ou disparus et 609 capturés. 75 % des pertes seraient imputables à l’artillerie.


Conclusion


Anzio est donc un bon exemple de la façon dont l’artillerie peut retourner la situation au niveau opérationnel. L’amélioration des tirs de contre-batterie s’est révélée décisive. L’artillerie a été plus efficace en tir concentré, et ses effets démultipliés lorsqu’elle a été appuyée par l’aviation et la marine. Lucas n’avait pas vu l’opportunité offerte par l’artillerie dans sa situation. S’il avait agi en artilleur, il aurait occupé les hauteurs des monts Albain dès le soir du jour-J et poussé au-delà jusqu’à ce que l’échelon arrière ne soit plus à portée de tir des canons ennemis. Comme le dit Colin Williams dans son article sur le sujet, « s’il avait compris l’artillerie, il n’aurait pas dû être sauvé par l’artillerie ! » .


La version publiée dans le blog de l’auteur comporte des annexes, une bibliographie indicative et des compléments vidéo d’informations.

Stéphane Mantoux, Historicoblog

Cet article est repris du site https://www.alliancegeostrategique.o...

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