Les autorités locales de la région Est du pays, notamment à Gatsibo, ont procédé à la destruction systématique des maisons en chaume dans leur circonscription. Il a été décrété que tout le monde avait l’obligation d’avoir une maison couverte de tôles ou de tuiles. Après les délais fixés, les démolitions des maisons couvertes de paille ont été commencé.
Cette action contre la population a choqué plus d’un, y compris les journaux gouvernementaux (« Imvaho nshya », du 02 au 05 novembre 2010 et « La Nouvelle Relève » du 06 au 09 décembre 2010), qui d’habitude encensent à longueur de journée la politique gouvernementale. Ils ont publié des témoignages très poignants à ce sujet. Ainsi un pauvre paysan trouvé avec ses 2 enfants sous un soleil de plomb devant sa maison démolie par les autorités de base, en son absence et sans l’avoir avisé, a déclaré : « Je ne dispose pas des moyens pour me procurer une nouvelle maison en tôles, je n’ai même personne pour me soutenir en vue d’en avoir. A moins que l’Etat me vienne en aide, dans le cas contraire, je ne sais pas comment résoudre seul ce problème d’abri qui respecte les normes actuelles ».
Un autre sinistré qui s’insurge lui aussi contre le fait que leurs autorités ne les ont pas avisés avant la démolition de leurs maisons, a dit : « Si nous étions avisés, certains d’entre nous allaient même chercher des moyens pour se construire des maisons en tôles. Le problème qui est là aujourd’hui est que tout simplement cette décision n’avait pas été communiquée à la population concernée ».
Cette politique de démolition des maisons en paille est cautionnée au plus haut niveau de l’Etat par le ministre de de l’Administration Locale et des Affaires Sociales, James Musoni et par le Gouverneur de la Province de l’Est, Ephrem Kabayija.
Les conséquences de cette barbarie sont énormes : des familles dorment à la belle étoile ou cherchent refuge chez des voisins, sans compter de nombreuses maladies dues aux mauvaises conditions de vie dans lesquelles vivent les victimes.
A y voir de très près, de telles pratiques de clochardisation de la population sont monnaie courante au Rwanda. Il suffit de se rappeler que dans la ville de Kigali, des quartiers entiers ont été rasés au bulldozer avant que les habitants ne soient indemnisés. Pour ceux qui l’avaient été, les sommes reçues étaient tellement dérisoires qu’elles ne permettaient pas de s’acheter un autre logis loin de la capitale.
La politique dite de villagisation initiée à partir de 1997 a fait les mêmes dégâts. Des maisons ont été détruites pour obliger leurs propriétaires à rejoindre des zones non encore viabilisées, où ils dormaient à la belle étoile. Il a fallu que les ONG et les bailleurs de fonds du Rwanda dénoncent ces pratiques inhumaines pour que la politique de villagisation forcée soit mise en veilleuse.
La loi sur le régime foncier, qui précise entre autres que les terres aux abords des lacs et des grands cours d’eau reviennent à l’Etat, a fait de nombreux sans-abris.
La province de l’Est est l’une de celles qui ont été le plus malmenée depuis 1990. Le Front Patriotique Rwandais (FPR), en provenance d’Ouganda, y a mené le maquis et la population des zones conquises était réduite en esclavage quand elle n’était pas massacrée.
Après la prise du pouvoir en juillet 1994, bon nombres de dignitaires du FPR, tant civils que militaires, ont chassé les populations autochtones pour s’approprier de leurs terres. Le scandale fit tellement de bruits que le président Paul Kagame a dû descendre sur les lieux pour régler la question.
Les appétits sur les domaines fonciers de la région restent vivaces. Ainsi, un autre prétexte a été trouvé pour chasser les habitants de leurs propriétés.
Gaspard Musabyimana
11/12/2010
Cet article est repris du site https://www.musabyimana.be/lire/arti...