Opération Géronimo : tel est le nom de code du raid mené la nuit du 1er mai 2011 par les US Navy Seals contre Oussama Ben Laden dans sa résidence pakistanaise. Cette opération a tout simplement sonné la deuxième mort d’Al-Qaïda « canal historique », la première ayant eu lieu lors des révoltes arabes (Tunisie, Egypte, Libye, Maroc, Yémen) de l’hiver 2010-2011.
En effet, ces mouvements non-violents de masse avaient réussi en quelques semaines là ou Ben Laden avait échoué par la terreur en plus de dix ans : provoquer des réformes en profondeur et/ou renverser des tyrannies installées depuis plusieurs décennies. Modernes et hyperconnectés, les jeunes révolutionnaires du fameux « printemps arabe » étaient nettement inspirés par le modèle turc de démocratie musulmanne et point du tout par le terrorisme islamiste. Un véritable désaveu pour le noyau dur d’Al-Qaïda.
Du soutien aux révoltes arabes à l’élimination de Ben Laden, le président américain Barack Obama a vite pressenti le vent de l’histoire et a brillamment réussi là ou son prédécesseur George W.Bush avait échoué. Selon Obama – qui bénéficie désormais d’un atout-maître pour sa réelection en 2012, « il vaut mieux utiliser un scalpel plutôt qu’un marteau contre Al-Qaïda ».
Aux yeux du peuple américain ayant soif de justice (et peut-être de vengeance), les morts du 11 septembre reposent désormais en paix.
L’opération Géronimo est également la preuve d’un succès relatif de la smart diplomacy américaine, notamment envers son allié trouble pakistanais. Malgré leurs dénégations, les autorités pakistanaises étaient certainement informées depuis longtemps du lieu de résidence de Ben Laden (dans la bourgade d’Abbottabad, à 50 km d’Islamabad) et ont du offrir un soutien silencieux et discret à cet assaut extrêmement efficace des US Navy Seals. Qui peut croire un instant que quatre hélicoptères d’attaque et de transport puissent décoller incognito d’une base aérienne pakistanaise et se poser dans la résidence de Ben Laden – à environ 500 mètres d’une académie militaire, sans que l’ISI en soit préalablement informée ?
Imaginons quelques instants qu’une opération héliportée menée par des forces spéciales étrangères se déroule dans un quartier assez huppé regroupant de nombreux officiers à la retraite, à portée de vue des académies militaires Saint-Cyr ou Wespoint, au nez et à la barbe du gouvernement français ou américain…
Washington a sûrement du proposer quelque juteux échange de bons procédés à Islamabad pour faciliter une telle opération au beau milieu du territoire pakistanais. Par ailleurs, l’inhumation en mer du corps de Ben Laden (qui voudrait d’une dépouille aussi sulfureuse dans ses terres ?) par l’US Navy suscite déjà d’extraodinaires théories du complot. Les autorités américaines feraient bien de vite diffuser des preuves visuelles de la mort du leader d’Al-Qaïda. Cela n’atténuera point les thèses conspirationnistes – relevant plus du déni constant de réalité que de la rationalité ou de la lucidité, mais donnera un peu plus de solide à la « communication Géronimo ».
Toutefois, Al-Qaïda n’a rien d’un cartel mafieux qui s’écroule dès élimination ou arrestation du parrain. La constellation terroriste sera tentée de faire d’autant plus preuve de sa nuisibilité de par le monde… avec ou sans son leader charismatique qui sera bientôt remplacé par son chef opérationnel Al-Zahrawi. Cependant, la mort de Ben Laden permettra aux multiples actions militaires et policières à l’échelle internationale de mieux « cibler, isoler et casser » les groupuscules djihadistes foisonnant en Afrique du nord, en Afrique orientale, au Moyen-Orient et en Asie centrale.
N’ayons pas peur des mots : le 1er mai 2011 est un moment historique et stratégique plutôt favorable dans la lutte contre le terrorisme.
Charles Bwele, Electrosphère
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