28 June 2011
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11. Intelligence stratégique : Afghans et Américains, des frères d’armes qui se haïssent
source : Alliance Geostrategique
Publié le 6 March 2010, dans la rubrique Intelligence stratégique..  Send this article by mail Send

La sortie de l’Afghanistan pour les armées occidentales passe par la formation d’une armée afghane compétente et digne de confiance. Problème, les différences d’objectifs et de culture ainsi qu’une grosse dose d’incompréhension ont tendance à créer des tensions entre soldats de l’ISAF et membres de l’Armée nationale afghane (ANA). Une équipe de chercheurs s’est penché sur la vision qu’ont ces armées l’une de l’autre.

Depuis mai 2007, 26 meurtres ou tentatives de meurtres perpétrés par des soldats afghans ont visé des occidentaux. Le bilan de ces attaques est de 58 personnels tués parmi les étrangers présents en Afghanistan. Une tendance qui s’aggrave puisque la majorité de ces incidents ont eu lieu depuis octobre 2009. Le nombre de victimes dues à ces agressions représente depuis 6% des pertes totales de la coalition.

Les reproches sont nombreux. Les soldats afghans interrogés ont le sentiment d’être lésés. Peu d’écoute de la part des soldats étrangers, américains en particulier, une agressivité évidente vis à vis des civils et des choix de missions ignorant l’ANA. Ils estiment que les arrestations devraient être menées uniquement de jour, les perquisitions nocturnes étant beaucoup trop mal perçues par les habitants. Ils décrivent des violences à répétition : tirs irréfléchis sur des civils et leurs propriétés, insultes envers des locaux ou des soldats afghans, menaces à l’aide d’armes pour obtenir des informations, arrogance ou encore humiliations de membres des forces de sécurité devant les populations.

Les Américains semblent être la proie de deux malaises de taille : usés par les combats, la peur et les rancunes, ils se laissent aller à la violence et ignorent les différences culturelles. Observation des femmes, langage ordurier ou encore pauses pipi en public sont des gestes que les soldats afghans n’acceptent pas. Ils comprennent encore moins les tirs gratuits sur les animaux ou les agressions dont ils sont victimes lorsqu’ils contestent les consignes des occidentaux. Pour les soldats de l’ANA, une bombe humaine a plus de chance d’aller au paradis qu’un Américain tué par l’ennemi.

Au combat enfin, ils n’accordent aucune confiance à des alliés qui ont tendance à ne pas traiter avec le même zèle les blessés locaux ou américains. Plusieurs Afghans interrogés regrettent de ne pas pouvoir profiter des vols de leurs alliés et d’être obligés de voyager par les routes, beaucoup plus dangereuses. D’après les témoignages cités dans ce document, les militaires étrangers ont tendance à mener leurs propres opérations dans leur coin, ignorant l’ANA et ses besoins. Les interviewés ne comprennent par exemple pas pourquoi certains équipements et munitions récupérés sur les insurgés ne sont pas redistribués aux soldats afghans qui en auraient l’usage plutôt que d’être détruits.

Les soldats afghans sont des drogués, des voleurs et des lâches

La vision qu’ont les soldats américains de leurs coreligionnaires locaux n’est pas beaucoup plus flatteuse. La liste est longue des reproches qu’ils leur font : voleurs, incompétents, violents, drogués ou même encore sales et feignants. Il est intéressant de noter que certains incidents dénoncés sont les mêmes des deux côtés comme les meurtres de chiens ou l’absence de maîtrise et de réflexion lorsqu’il faut faire usage des armes au combat.

Loin de voir les soldats afghans comme des alliés, beaucoup d’Américains les perçoivent comme des ennemis potentiels et une menace sous le feu. Les sondés estiment à 50% que les membres de l’ANA sont des islamistes radicaux. Ils dénoncent des violences et une absence totale de respect vis-à-vis des femmes et des enfants. L’absence de confiance est totale et se ressent dans les combats au cours desquels les soldats occidentaux se méfient en permanence de leurs camarades afghans.

Incompréhension et rancoeur

Beaucoup des réponses données par les soldats des deux camps lors de cette enquête montrent une absence totale de compréhension, tant dans les usages professionnels que dans la culture ou l’approche du théâtre opérationnel. Alors que les Américains ont le sentiment d’être là pour protéger les populations locales malgré une évidente hostilité de celles-ci, les Afghans ont l’impression qu’ils méprisent totalement les vies humaines et qu’ils n’hésitent pas à les gaspiller pour protéger l’un de leurs hommes.

Les histoires rapportées par les sondées donnent parfois l’impression d’être des légendes urbaines. Les « on m’a dit que » sont récurrents et participent à l’ambiance explosive entre les deux camps. Il est fort probable que ces faits d’armes soient le fruit d’une minorité de soldats, d’un côté comme de l’autre, qui se laissent aller à l’indiscipline et à la violence gratuite dans des contextes de guerre compliquant l’analyse objective. Le résultat est pourtant évident : l’ensemble des hommes accumule rancœurs et rêves de vengeance.

L’étude propose une soixantaine d’efforts à réclamer de part et d’autre pour améliorer la situation. La conclusion reste pourtant prudente quand aux capacités des deux armées de désamorcer les tensions. Américains et Afghans ont conçu au fil des années une vision parfaitement négative de leurs homologues. Les pratiques martiales et l’approche de la population ne sont pas les mêmes. Malgré la volonté des responsables militaires de faire coïncider les capacités des uns et des autres, les réalités du terrain sont autres et les hommes ne parviennent pas à s’entendre.

Une violence morale, sinon physique, extrême transparaît des résultats de ce rapport. Plus que du mépris, c’est de la colère voir de la haine qui existe entre des soldats dont l’avenir mutuel dépend des uns et des autres. Les Afghans ne peuvent pas tenir le terrain seuls et les Américains ne peuvent se désengager sans une ANA correctement formée et équipée. A l’échelon du soldat, le bras de fer semble pourtant quotidien pour s’imposer face à l’autre. Les témoignages font remonter un problème récurrent : pour se faire entendre, tous en arrivent souvent à braquer leurs armes sur leurs alliés, allant parfois jusqu’à appuyer sur la détente.

Lire le rapport :

Le rapport A crisis of Trust and Culture incompatibility de Jeffrey Bordin.

Photos : US Army / Specialist George Hunt

Romain Mielcarek

ActuDéfense

Cet article est repris du site https://alliancegeostrategique.org/2...

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